Quand la Sécurité Routière révèle qu’un accident mortel sur trois en France est dû à la fatigue, il y a de quoi réfléchir. « Le trajet n’est pas long », « Je suis obligé de prendre la voiture ». Nous nous sommes tous déjà imposé ces phrases pour nous convaincre que nous étions en état de conduire. Pourtant, le président du Conseil scientifique de l’INSV, Damien Léger affirme que « Dès les premiers signes de somnolence, les risques d’avoir un accident sont multipliés par 3 ou 4 ». Comment mettre en cause la fatigue en cas de litige ou d’accident ? Des scientifiques australiens sont en phase de mettre au point un test sanguin pour détecter la fatigue au volant…
Un test sanguin pour détecter la fatigue au volant, expliquez-nous !
À l’instar des tests d’alcoolémie ou des contrôles antidopage, le test sanguin en train d’être mis au point par des scientifiques australiens pour nous informer si nous sommes à même de conduire.
Leurs études portent sur cinq biomarqueurs sanguins capables de définir si une personne est restée éveillée 24 heures d’affilée ou plus. Le professeur Clare Anderson, qui dirige les recherches en Australie à l’Université de Monash à Melbourne, révèle que ce test sanguin utilisé, en condition réelle, serait fiable à plus de 90 %.
Toujours selon le professeur C. Anderson relayait par le journal britannique The Guardian, la présence de ces cinq biomarqueurs dans lié « à la durée d’éveil d’une personne et ils sont cohérents d’un individu à l’autre. » Il ajoute que « Certains d’entre eux sont des lipides, d’autres sont produits dans l’intestin, donc ils proviennent de différentes parties du corps - ce qui est intéressant, car le sommeil est impliqué dans un certain nombre de problèmes de santé différents ».
À quand le déploiement de ce test sanguin pour détecter la fatigue au volant ?
À ce jour, le test sanguin n’est pas encore prêt à être utilisé à grande échelle. Les chercheurs estiment que des travaux sont encore nécessaires. Ces derniers ont notamment pour but de valider (ou d’invalider) le rôle clef de ces biomarqueurs. Les recherches supplémentaires tenteront également de montrer si ces marqueurs sanguins peuvent quantifier la durée de sommeil d’un individu.
La mise en place de tests routiers en revanche, n’est pas pour demain. Il faudra du temps pour développer les dispositifs, sous forme de « kits portatifs », capables de détecter les biomarqueurs lors d’un contrôle routier effectué par les forces de l’ordre. Toujours auprès des journalistes britanniques, le professeur Shantha Rajaratnam, également attachée à l’Université Monash estime que ces dispositifs pourront être prêt « d’ici cinq ans » et « avec le bon investissement ». Dans un premier temps, ces contrôles de fatigue pourraient être utilisés dans les entreprises de camionnage ou encore l’aviation par exemple.
Quelle législation possible pour ce test sanguin de détection de la fatigue au volant ?
Vous l’aurez compris, la popularisation d’un test sanguin capable de déceler la fatigue au volant chez un individu prendra encore du temps. Néanmoins, les recherches avancent très vite et il n’est pas trop tôt pour se poser les questions de législation.
Le saviez-vous : En France, la somnolence au volant est déjà passible d’une amende de 35 € selon l’article R 412-6 du Code de la route. Il stipule que « Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d’exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent. »
La mise en place de ce test nécessiterait notamment de fixer un minimum d’heures d’éveil à ne pas dépasser avant d’être amendable. La loi devrait également s’adapter et créer une nouvelle forme de délit. En cas d’accident afin, le test sanguin de détection de la fatigue au volant serait-il reconnu ? Quel poids aurait-il dans le cadre d’un accident mortel ?
Pour le moment c’est autant d’inconnues qu’il reste à éclaircir quant à l’application et l’utilisation légales de ce test sanguin.
Le manque de sommeil, quelles conséquences sur la route ?
La fatigue au volant est un véritable fléau. Le rapport de 2016 mené par la Société de l’Assurance Automobile au Québec révèle qu’un conducteur sur dix a déjà conduit alors qui se sentait fatigué. Cette étude rapporte également que 2 % des sondés (sur un total de 1 182 répondants) avouent s’être déjà endormis au volant. Ces chiffres sont assez effrayants quand on pense à la vulnérabilité des autres usagers (piétons, cyclistes, motocyclistes…), ceux dont la protection sur la route est moindre.
Plus inquiétant encore, l’étude publiée le 4 avril 2023 dans la revue Nature and Science of Sleep démontre que prendre le volant en ayant dormi moins de cinq heures représente autant de risques d’avoir un accident que le dépassement de la limite légale d’alcoolémie (elle est de 0,5 g d’alcool/L de sang en France).
Rouler vite fatigue !
Loin d’être une idée reçue, rouler vite présente de réelles conséquences sur la fatigue et la concentration du conducteur. Ce dernier a en effet moins de temps pour traiter l’information de la route ce qui augmente, le stress, la fatigue et diminue la vigilance au volant.
Sur les autoroutes françaises, un tiers des accidents mortels sont causés par la fatigue et la somnolence.
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- Journal britannique, The Guardian : https://www.theguardian.com/science/2023/may/08/blood-test-for-sleepy-drivers-could-pave-way-for-prosecutions
- Société de l’Assurance Automobile au Québec : https://saaq.gouv.qc.ca/fileadmin/documents/publications/espace-recherche/rapport-sondage-postcampagne-fatigue-volant-2016.pdf
- Revue Nature and Science of Sleep : https://www.dovepress.com/how-tired-is-too-tired-to-drive-a-systematic-review-assessing-the-use--peer-reviewed-fulltext-article-NSS
- Sécurité routière : https://www.securite-routiere.gouv.fr/dangers-de-la-route/la-fatigue-et-la-conduite